La cuisine médiévale. Généralités: D'après le Canon d'Avicenne, il existe
8 saveurs différentes : douce (représentée par le miel), grasse (le beurre),
amère (la noix), acide ou aigre (le vinaigre), austère ou resserrée (le
cédrat pas mûr), acerbe, et piquante (les épices). D'autres textes y ajoutent
l'insipide, matérialisée par le blanc d'œuf. Cette classification cadre
assez mal avec les 4 éléments (feu air eau terre), mais il existe des tables
de correspondance, comme celle de Barthélémy l'Anglais (Livre de propriétés
des choses, XVème siècle). Le Tacuinum Sanitatis est une traduction d'un
livre écrit à Bagdad par Ibn Butlab au Xème siècle. Il contient des tableaux
présentant les qualités des aliments. La seconde version voit le jour en
Italie au XVème siècle. Richement décorée, chaque page contient une illustration,
accompagnée de peu de texte. Ainsi le fromage frais est-il décrit comme
froid et humide. Il est meilleur s'il est issu du lait tempéré d'animaux
sains. Du côté positif, il amollit et engraisse les corps, mais il provoque
la constipation ; on peut éviter cet effet néfaste en l'accompagnant d'amandes
et de noix (d'une nature chaude et sèche). On croit au Moyen Age qu'il
y a une correspondance entre le corps humain, sur lequel agissent 4 humeurs
(le sang, le phlegme, la bile jaune et la bile noire), en relation avec
les 4 éléments. Ainsi le sang est-il chaud et humide, comme l'air, et la
mélancolie, froide et sèche, correspond au phlegme ou à la terre. Cela
influe sur les aliments : les volatiles, qui vivent dans l'air, sont eux
aussi chauds et humides, tandis que les légumes racines, au contact de
la terre, sont froids et secs. Pour conserver sa bonne santé, un individu
doit consommer des aliments qui lui permettent de maintenir l'équilibre
de ses humeurs. Suivant son tempérament, sa nourriture ne sera pas la même.
En cas de maladie, il faut absorber des aliments qui compenseront l'excès
d'humeurs dans un sens ou l'autres ; ainsi, un malade fiévreux mangera-t-il
des cucurbitacées, des melons, des salades, des crudités, peu recommandés
aux gens en bonne santé. Avec l'âge, le sexe, la saison, le lieu géographique,
l'équilibre d'une même personne peut évoluer : on devient plus froid et
sec en vieillissant. La classification des aliments dans un sens ou l'autre
contient aussi 4 degrés. Ceux pour lesquels ce degré est faible sont consommables
sans dangers, les autres doivent être traités avec précaution. Beaucoup
d'aliments bénéfiques sont chauds et humides : ils vont dans le sens naturel
du corps humain. Le fait qu'ils soient chauds facilite la digestion, qui
est considérée comme une deuxième cuisson, après celle faite dans la cuisine.
Manger cru ou froid est dangereux : l'estomac doit alors faire tout le
travail ; il existe un pape dont il fut dit qu'il était mort d'avoir mangé
trop de melons. On doit compenser l'excès de certains aliments en les accompagnant,
comme par exemple le melon avec du vin, ou du sel. Ce fruit doit être pris
en début de repas, car sa digestion est plus longue. Au contraire, le fromage
vieilli doit être absorbé en fin de repas, car il risque de n'être pas
suffisamment cuit si on mange quelque chose après. Il existe des livres
de recettes écrits par des médecins à destination des malades, présentant
des mets visant à imiter d'autres plats. Ainsi Petrus Musandinus (XIIème
siècle) explique-t-il des ruses pour donner à du poulet l'apparence du
boeuf, pour blanchir un plat, comment préparer la pâte d'une tourte si
le malade souhaite la manger, etc. Bref les médecins du Moyen Age considèrent
que le malade mangera mieux, et donc se rétablira plus vite, si son plat
est appétissant [rien à voir avec la cuisine de nos hôpitaux]. Le goût
des mets et celui des mots dans la littérature de la fin du Moyen Age :
Du fait du péché de goula, il est malséant de se délecter de la nourriture.
Dans la littérature de la fin du Moyen-Age, on le fait donc de manière
détournée. "La vie de Saint Hareng" raconte l'histoire d'un saint, martyrisé
de mille manières différentes : rôti, cuit à l'étouffée avec des pois,
etc. Sous prétexte d'histoire sainte, on a droit à toutes les manières
dont on peut préparer le hareng, poisson particulièrement utilisé lors
des nombreux jours maigres qui parsèment l'année (un sur trois). Dans "Les
neuf preux de gourmandise", plus ou moins inspiré de l'histoire des neuf
preux, sont présentés des personnages bibliques ayant eu un rapport avec
la nourriture (en particulier Noé, qui s'est saoulé dans sa tente). La
"Cena Cypriani" (Vème au VIIIème siècle (?) présente un repas donné par
un roi, qui invite lui aussi des personnalités bibliques, lesquelles apportent
un aliment en rapport avec eux, parfois de manière subtile : viennent Eve,
Noé, et Jésus avec des raisins (en latin "passus", ce qui n'est pas très
éloigné de "Passion") Il existe plusieurs versions de "Carême et Charnage",
une pièce jouée juste avant le carême. La première est accompagnée de harengs
et autres plats maigres, tandis qu'avec Charnage viennent grasses porées,
saucisses, andouilles, laitages, etc. Dans la lutte qui les oppose, Charnage
l'emporte, mais autorise Carême à revenir 6 semaines et 3 jours par an.
En cette fin du Moyen Age, la société s'intéresse de plus en plus à la
nourriture, dans la littérature, les livres de cuisine ou de diététique,
s'acheminant petit à petit vers un soucis de soi et du bien-être qui mettra
encore plusieurs siècles à aboutir. En plus des tranchoirs, les convives
autour de la table disposent d'un morceau de pain, de meilleure qualité,
pour la consommation. Si la théorie veut qu'on prenne 2 repas par jours,
cela varie beaucoup : dans certains règlements de métier, il est question
de 5, surtout en été, tandis que les moines n'en prennent qu'un en période
de carême. Le nombre de repas pris dans la journée marque donc aussi le
statut social. Recommandations sur l'emploi du sel"je disois que tout excez
conduit lhomme droit au decez. Ainsi le trop fréquent usage Du sel nuit
aux yeux du visage, Et pour trop manger de salé, Tel Galand sest long-temps
galé. Je dis plus que la semence Le sel retranche labondance. Ainsi, Mes-Dames
de Paris; Prenez-y doresnavant garde, Et chacune de vous garde, Pour bien
profiter de ce mot, De mettre trop de sel au pot"
avec des produits de la région Poitou-Charentes et d'Ecosse of course
!
du pain et des bouillies (Cunningham d'origine Ecossaise devait les apprécier
(les plaines de Cherveux sont favorables à la culture du blé) ainsi que
des
pastez
cusiné par les pâtissiers
du gibier avec les bois et forêts environnantes
des vinaigres de vin,
des sauces, du
verjus
La fin du XVème siècle est une époque où le bien manger fait partie intégrante
de la vie, de la fête et du plaisir de vivre. La cuisine offre des mélanges
de parfums, de couleurs et de saveurs les plus inattendus et les plus élaborés.
Le moyen Age est une époque ou l'on cuisine dans les milieux aisés avec
des épices rapportées d'orient. Au XVème, l' usage du sucre se répand en
France, où il entre dans la composition de la sauce cameline, mais sa présence
dans un plat peut conduire à lui donner un nom particulier, montrant que
ce n'est pas un condiment commun : ainsi en est-il du "pigeon au sucre".
Au XVème siècle, la canne pousse en Sicile et en Espagne. Sans doute devaient
ils se servir aussi du Mesnagier de Paris et du viandier de Taillevent
pour préparer leurs repas et leurs banquets